Vous cherchez une plante grasse capable de transformer un talus ingrat en tapis fleuri spectaculaire ? Le Carpobrotus, surnommé griffe de sorcière, pourrait être la candidate idéale. Cette succulente sud-africaine offre une floraison généreuse de mai à octobre sans réclamer le moindre arrosage en pleine terre.
Votre terrain sablonneux en plein soleil reste désespérément nu ? Votre talus pentu vous donne du fil à retordre ? Le Carpobrotus excelle là où les autres plantes peuvent avoir du mal à s’adapter. Utilisé pour stabiliser les dunes sur le littoral méditerranéen, il forme un couvre-sol dense qui tient bon face aux embruns et à la canicule. Mais attention : son caractère invasif impose des restrictions sérieuses près des côtes.
Dans ce guide, vous découvrirez les principales espèces (Carpobrotus edulis, Carpobrotus acinaciformis…), les secrets d’une culture réussie (sol drainé, exposition, arrosage minimal), et surtout comment profiter de cette beauté sans nuire à l’environnement. Que ce soit en rocaille, sur un muret ou en pot suspendu, vous saurez exactement comment l’entretenir du mieux possible.
Sommaire
Portrait botanique d’une succulente hors du commun
Origine et classification : une succulente aux fruits comestibles
Le Carpobrotus appartient à la famille des Aizoacées. Son nom vient du grec “karpos” (fruit) et “brôtos” (mangeable) – un indice sur ses fruits comestibles qu’on surnomme “figues de mer”.
Originaire des régions sèches d’Afrique du Sud, notamment du Cap, cette plante grasse a conquis le monde au début du XXe siècle. Son introduction en Europe avait deux intérêts : l’aspect ornemental de ses fleurs éclatantes et sa capacité à fixer les sols contre l’érosion. Le genre compte environ 25 espèces, principalement sud-africaines, mais aussi quelques natives d’Australie, d’Amérique du Sud et de Californie.
Le genre Carpobrotus est aussi connu sous ses multiples surnoms : griffe de sorcière, figuier des Hottentots, ficoïde comestible, figue marine, croc de sorcière, doigt de fée… Tous font référence soit à ses fruits, soit à la forme caractéristique de ses feuilles charnues recourbées comme des griffes.
Morphologie : un feuillage succulent unique
Ce qui frappe chez le Carpobrotus, c’est son feuillage succulent très caractéristique. Les feuilles sont épaisses, charnues, avec une section triangulaire : équilatérale chez Carpobrotus edulis (trois angles égaux), isocèle chez Carpobrotus acinaciformis (deux angles égaux). Cette distinction permet d’identifier rapidement l’espèce devant vous.
Mesurant entre 8 et 11 cm de long pour 8 à 13 mm d’épaisseur, les feuilles sont opposées sur les tiges et leur extrémité se recourbe en créant cet effet de “griffe”. Leur couleur varie du vert clair au vert bleuté, virant au rouge ou orangé en plein soleil – un changement qui ajoute un aspect exotique très apprécié.
Les tiges rampantes sont flexibles et peuvent s’étaler spectaculairement : de 60 cm à 3 mètres ! Elles s’enracinent facilement à chaque nœud au contact du sol (marcottage spontané), permettant à la plante de coloniser rapidement l’espace. En hauteur par contre, le Carpobrotus reste modeste : rarement plus de 15 à 30 cm. Cette combinaison fait de lui un couvre-sol redoutablement efficace.


Floraison spectaculaire : six mois de fleurs éclatantes
Les fleurs du Carpobrotus, solitaires et terminales, ressemblent à de grosses marguerites rayonnantes. Leur diamètre varie selon les espèces : de 5 cm pour Carpobrotus chilensis jusqu’à 15 cm pour Carpobrotus quadrifidus. Les pétales nombreux et linéaires se déploient en rayons autour d’un cœur généralement jaune.
La palette de couleurs est étendue : jaune vif pour le Carpobrotus edulis, rose fuchsia à rouge pourpré intense pour le Carpobrotus acinaciformis, ou rose violet avec étamines blanches pour le Carpobrotus virescens. Des nuances intermédiaires apparaissent parfois, fruit d’hybridations naturelles entre le C. edulis et le C. acinaciformis.
La période de floraison s’étend de mai à octobre, soit six mois ! C’est l’un des atouts majeurs : alors que beaucoup de succulentes et cactus ne fleurissent que quelques semaines, le Carpobrotus produit continuellement de nouveaux boutons. Les fleurs s’ouvrent au soleil (elles sont héliotropes) et se referment en soirée. Chaque fleur ne dure qu’une journée, mais la production continue crée l’illusion d’un tapis fleuri permanent.


Les fruits du Carpobrotus
Après la floraison, les “figues de mer” se développent : fruits épais et charnus de 2-3 cm de diamètre, rose devenant jaunes à maturité. Ils contiennent près de 2000 graines dans un mucilage collant, facilitant leur dispersion par les animaux ou les fourmis. Ces fruits sont comestibles, avec une saveur acidulée légèrement astringente.


Les principales espèces de Carpobrotus
Carpobrotus edulis : la star aux fleurs jaunes
Carpobrotus edulis est l’espèce la plus répandue, naturalisée sur tous les continents au climat doux.
Caractéristiques distinctives :
- Grandes fleurs jaune éclatant de 5 à 12 cm, parfois teintées de rose sur les bords ;
- Floraison de mai à juillet avec remontée possible en fin d’été ;
- Feuilles à section triangulaire équilatérale, vertes à rouges selon l’exposition ;
- Port rampant de 20 cm de hauteur, étalement sur plusieurs mètres ;
- Fruits charnus et comestibles, goût entre figue et kiwi ;
- Rusticité : -1 à -3°C (zone USDA 9b).
Cette espèce s’hybride facilement avec C. acinaciformis, créant des variétés aux couleurs intermédiaires du jaune pâle au rose soutenu.
Carpobrotus acinaciformis : l’élégance pourpre
Carpobrotus acinaciformis mise sur l’intensité avec ses fleurs spectaculaires dans des tons chauds.
Caractéristiques distinctives :
- Fleurs rose fuchsia à rouge pourpré intense de 5 à 12 cm ;
- Floraison de mai à juillet, spectacle visuel saisissant ;
- Feuilles à section triangulaire isocèle, vert grisâtre, légèrement cloquées à la base ;
- Dimensions : 15 à 30 cm de hauteur, étalement indéterminé ;
- Fruits savoureux, considérés comme les meilleurs du genre ;
- Rusticité similaire à C. edulis (environ -3°C).
Utilisée massivement pour la stabilisation de dunes, elle peut devenir problématique sur le littoral en échappant à tout contrôle.
Autres espèces remarquables
Carpobrotus chilensis (figue des mers)
- Petites fleurs roses parfumées de 3-5 cm ;
- Feuilles vert bleu à bout arrondi ;
- Hauteur : 15-30 cm ;
- Origine probable : Chili.
Carpobrotus deliciosus
- Fruits particulièrement savoureux (d’où son nom) ;
- Fleurs blanc ou rose de 6-8 cm ;
- Fruits avec petite aile dorsale caractéristique ;
- Origine : dunes d’Afrique australe.
Carpobrotus glaucescens
- Fruits rouges au goût légèrement salé (rare !) ;
- Fleurs rose ou violet, étamines jaune pâle ;
- Feuilles en forme de faucille ;
- Origine : est de l’Australie.
Carpobrotus muirii
- Feuilles comestibles, considérées comme légume au Cap ;
- Fleurs pourpre de 6-9 cm ;
- Origine : zones sableuses d’Afrique du Sud.
Carpobrotus quadrifidus
- Détient le record : fleurs de 12-15 cm de diamètre ;
- Couleur : blanc pur au rose pourpre ;
- Tiges quadrangulaires caractéristiques (4 angles) ;
- Hauteur : environ 20 cm.
Carpobrotus virescens
- Fleurs rose foncé avec étamines blanches ;
- Floraison en fin d’été (août-septembre) ;
- Fruits doux au goût ;
- Étalement : 0,50 à 2 m.
Culture du Carpobrotus : les secrets d’une réussite garantie
Exposition et climat : le plein soleil est non négociable !
Le Carpobrotus exige du soleil, beaucoup de soleil. Minimum 6 heures de soleil direct par jour, idéalement plus. Dans son habitat naturel sud-africain, il pousse en plein désert côtier. Sans cette exposition, les fleurs resteront fermées et la plante s’étiolera.
Cette exigence s’explique : les fleurs ne s’ouvrent qu’au soleil. En conditions ombragées, non seulement la floraison sera clairsemée, mais les fleurs resteront closes. Le manque de lumière favorise l’étiolement (tiges molles et décolorées) et augmente les risques de pourriture.
Côté températures : Le Carpobrotus adore la chaleur et tolère la canicule (35-40°C). C’est le froid qui pose problème. La rusticité varie selon les espèces : -1°C à -4°C de température minimale (zone USDA 9b minimum).
Où le cultiver en pleine terre ?
- Littoral méditerranéen et atlantique (de la Vendée au Pays Basque) ;
- Vallées abritées avec microclimat doux ;
- Zones urbaines (effet îlot de chaleur).
Ailleurs, la culture en pot s’impose avec hivernage dans un local lumineux, frais mais hors gel (véranda, garage avec fenêtre, serre froide).
Point crucial : La résistance au froid dépend énormément de l’humidité. Un froid sec à -3°C sera mieux supporté qu’un froid humide à -1°C. C’est l’association “froid + humidité” qui tue la plante par pourriture. En zones urbaines, au pied d’un mur exposé sud, le Carpobrotus survit parfois dans des régions où il gèlerait en rase campagne.
Dernier atout : le Carpobrotus supporte les expositions “brûlantes” où les autres plantes souffrent. Talus plein sud, sommet de muret, pente rocailleuse… c’est là que la Griffe de sorcière s’épanouira ! Elle résiste aussi très bien aux embruns, au vent (feuilles souples qui ne cassent pas), et à la pollution urbaine.
Le sol idéal : drainage absolu
Le drainage est LA condition sine qua non. Le Carpobrotus ne tolère absolument pas l’humidité stagnante au niveau des racines. Dans la nature, il pousse dans des sols sablonneux, rocailleux, voire dans le sable pur des dunes – des substrats où l’eau s’infiltre immédiatement.
Sol idéal : Un sol léger, pauvre, plutôt sableux ou rocailleux. Contrairement aux idées reçues, la pauvreté est un avantage ! Les sols riches retiennent trop d’eau et favorisent une croissance molle. Le Carpobrotus préfère un sol squelettique où il développe un système racinaire robuste.
Si votre terre est argileuse ou lourde :
- Ajouter du sable de rivière grossier (50% du volume) ;
- Ajoutez des graviers, pouzzolane ou autres matériaux drainants ;
- Plantez au sommet d’un muret ou dans une rocaille.
Le pH importe peu : le Carpobrotus accepte les sols légèrement acides, neutres ou alcalins. C’est la structure qui compte, pas la chimie.
Pour la culture en pot : Substrat encore plus drainant : 50% terreau + 50% sable de rivière grossier (ou mélange sable/perlite/pouzzolane). Couche drainante obligatoire : 20% du volume du pot en graviers. Le pot doit être impérativement percé (quelques conseils pour choisir le meilleur pot).
Dans les régions très pluvieuses, installez votre Carpobrotus sous un avant-toit ou créez une protection contre la pluie. C’est l’humidité prolongée qui pose problème, pas tant le froid.



Plantation : timing et technique
Quand planter ? En extérieur, attendez que les risques de gelées soient écartés : mai dans la plupart des régions, début juin en altitude. En zone méditerranéenne ou atlantique douce, vous pouvez aussi planter en septembre et octobre, les pluies d’automne aideront l’installation. Évitez l’hiver et le début de printemps.
Technique de plantation
- Préparation : Ameublissez le sol sur 30-40 cm en incorporant sable et matériaux drainants si nécessaire.
- Espacement : 30 cm minimum entre les plants (50 cm si vous n’êtes pas pressé). Pour un effet couvre-sol rapide, comptez 9 pieds/m².
- Le trou : Déposez une poignée de graviers au fond avant d’installer la motte – cela évite que l’eau ne s’accumule.
- Installation : Placez le plant avec le collet exactement au niveau du sol. Comblez avec la terre préparée en tassant fermement pour éliminer les poches d’air.
- Arrosage initial : Arrosez légèrement après la plantation, juste pour humidifier. Ensuite, en pleine terre, oubliez l’arrosage ! Même pendant les premières semaines, le Carpobrotus supporte un peu de stress hydrique qui l’encourage à développer des racines profondes.
- Sur talus : Créez une petite cuvette d’arrosage autour de chaque plant pour empêcher le ruissellement. Disposez les plants en quinconce plutôt qu’en lignes droites pour un aspect plus naturel.
Arrosage : moins c’est mieux !
Si nous devions désigner la cause numéro un d’échec avec le Carpobrotus, ce serait peut-être l’excès d’eau. Beaucoup de jardiniers et passionnés ont du mal à accepter qu’une plante puisse souffrir d’être trop arrosée.
En pleine terre
Une fois installée (2-3 mois), la règle est ultra simple : ne l’arrosez pas. Laissez faire la nature. Les pluies occasionnelles suffisent, même en plein été méditerranéen. Le Carpobrotus est physiologiquement adapté à la sécheresse : feuilles charnues qui stockent l’eau, cuticule épaisse qui limite l’évaporation, racines profondes.
Mieux encore : moins vous arrosez, mieux la plante se porte ! Un Carpobrotus trop arrosé développe des tissus mous et sensibles aux maladies. Cultivé au sec, il produit des tissus fermes et une floraison plus abondante. De nombreux amateurs ont vu leur Griffe de sorcière exploser de fleurs après avoir arrêté complètement les arrosages.
En pot
Attendez que le substrat soit complètement sec en profondeur (enfoncez le doigt) avant d’arroser à nouveau. Quand vous arrosez, faites-le copieusement jusqu’à ce que l’eau s’écoule par les trous, puis laissez bien s’égoutter. Ne laissez JAMAIS d’eau stagner dans la soucoupe, videz-la 15-20 minutes après l’arrosage.
Fréquence indicative (à adapter en fonction de la chaleur) : une fois par semaine en plein été, toutes les deux semaines au printemps/automne, une fois par mois (voire pas du tout) en hiver.
- D’octobre à avril : Réduisez drastiquement les arrosages. C’est la période de repos, et un substrat humide favorise la pourriture. La combinaison “froid + humidité” est mortelle et source de maladies.
- D’avril à octobre : Si les feuilles semblent un peu molles en plein été, ne paniquez pas ! C’est un mécanisme de protection contre la chaleur, pas un signe de soif. Elles retrouveront leur fermeté dès que la température baissera. Arroser à ce moment-là créerait un excès d’eau inutile.
Entretien et multiplication : la simplicité avant tout !
Un entretien minimaliste
L’un des grands atouts du Carpobrotus ? Il demande très peu d’entretien.
- Engrais : Aucun besoin. Le Carpobrotus pousse dans des sols très pauvres. L’engrais azoté encourage une croissance molle et des tissus sensibles aux maladies. Économisez-le pour d’autres plantes !
- Taille : Généralement inutile, sauf si la plante déborde. Vous pourrez alors couper les tiges avec un sécateur propre (désinfecté). Aussi, vous pouvez couper les fleurs fanées si vous ne voulez pas de fruits ou pour limiter la dissémination.
- Protection hivernale : Dans les régions limites, installez un voile d’hivernage lors des coups de froid ou paillez la base avec des graviers (évitez les paillis organiques qui retiennent l’humidité). Une protection contre la pluie peut aussi aider.
En pot : Rentrez dans un local hors gel (5°C minimum), lumineux, aéré et sec dès que les températures descendent sous 5°C la nuit. Pendant l’hivernage, inspectez régulièrement, supprimez les parties abîmées, et arrosez très parcimonieusement (une fois par mois maximum).
Au retour des beaux jours (avril-mai), ressortez progressivement votre Carpobrotus en l’acclimatant sur une semaine pour éviter les brûlures, comme pour les cactus au printemps.
Multiplication : trois méthodes faciles
Le bouturage : la solution infaillible
Le bouturage est la méthode la plus rapide et efficace. Le Carpobrotus produit naturellement des racines à chaque nœud, rendant le bouturage presque garanti. La meilleure période pour bouturer : printemps et été.
Technique en 5 étapes :
- Sélectionnez une tige saine avec plusieurs nœuds visibles ;
- Coupez des morceaux de 15-20 cm avec un sécateur ou couteau propre et désinfecté ;
- Laissez sécher la coupe 24-48h à l’ombre dans un endroit sec pour cicatriser ;
- Plantez dans un mélange 50 % terre + 50 % sable sur 3-4 cm ;
- Humidifiez légèrement, placez à la lumière sans soleil direct (18-25°C).
L’enracinement devrait se faire en 3-4 semaines. Attendez 2-3 mois avant de rempoter ou planter en pleine terre. Taux de réussite : environ 90%.
La division de touffes : rapidité et efficacité
Encore plus simple, la division de touffes donne immédiatement des plants de belle taille capables de fleurir la première année. Idéal au printemps.
Procédure :
- Déterrez complètement la plante mère ;
- Identifiez les points de séparation naturels ;
- Séparez en plusieurs morceaux (chacun avec 2-3 tiges et racines) ;
- Laissez sécher les coupes quelques heures si nécessaire ;
- Replantez immédiatement dans un substrat drainant.
Reprise généralement sans problème en quelques semaines.
Le semis : pour les plus patients
Méthode la plus longue mais peut-être la gratifiante ? Le semis permet de tester des espèces rares ou d’obtenir beaucoup de plants à moindre coût. Pour en savoir plus sur les semis des cactus (même principe), rendez-vous sur cette page.
Semis en mars (au chaud) :
- Préparez des caissettes avec mélange 50% terreau + 50% sable ;
- Semez en surface ou à 1 cm de profondeur ;
- Couvrez avec un couvercle transparent (20-25°C) ;
- Maintenez légèrement humide par vaporisation ;
- Germination en 2-4 semaines ;
- Repiquez quand les plantules ont 3-4 vraies feuilles ;
- Plantez en pleine terre en mai.
Semis en avril (en place) :
- Semez directement en poquet (3-4 graines) à 1 cm, espacés de 30-40 cm ;
- Humidifiez légèrement ;
- Éclaircissez en ne gardant que la plus belle plantule par poquet.
Le semis permet d’observer la variabilité génétique : les plants peuvent présenter des couleurs de fleurs différentes de la plante mère, surtout après hybridation naturelle.


Problèmes et maladie courants et solutions
Pourriture du collet et des racines
Le problème le plus fréquent, toujours lié à l’excès d’eau ou au mauvais drainage. Symptômes : base molle et brune, tiges sans rigidité, feuilles jaunissantes.
Solution immédiate : stoppez tout arrosage. En pot, dépotez et coupez toutes les parties pourries (brunes et molles). Rempotez dans un substrat neuf et parfaitement drainé, sans arroser pendant deux semaines. En pleine terre, tentez d’arracher, couper les parties atteintes, et replanter dans un emplacement mieux drainé. La prévention reste la clé : drainage impeccable et arrosage minimal, comme mentionné précédemment.
Cochenilles farineuses
Les cochenilles farineuses sont des petits insectes blancs ressemblant à du coton, logés à l’aisselle des feuilles. Ils affaiblissent la plante en ponctionnant la sève.
Traitement : badigeonnez chaque cochenille avec un pinceau imbibé d’alcool à 70°. L’alcool dissout leur cire protectrice. Répétez chaque semaine pendant un mois. Pour les fortes infestations, pulvérisez un mélange eau + savon noir (1 c. à soupe/litre) + alcool (1 c. à soupe/litre), trois fois à une semaine d’intervalle.
Escargots et limaces
Ils raffolent des jeunes pousses tendres au printemps. Traces de mucus et morsures irrégulières sur les feuilles.
Solutions : ramassage manuel en soirée, retournement du sol pour exposer les œufs, réalisez une barrière à l’aide de cendres, sciure, coquilles d’œufs écrasées, bandes de cuivre, ou réalisez un piège à bière.
Flétrissement estival
Feuilles un peu molles en plein été : ne paniquez pas ! C’est un mécanisme de protection contre la chaleur, pas un signe de soif. La plante réduit la turgescence pour limiter l’évaporation. Les feuilles retrouveront leur fermeté dès que la température baissera. Arroser à ce moment créerait un excès d’eau dommageable voire fatal. Un vrai stress hydrique se reconnaît à des feuilles jaunâtres qui se rident profondément (mais il faut vraiment des conditions extrêmes pour en arriver là).
Utilisation ornementale : exploitez le potentiel décoratif des Griffes de sorcière
Couvre-sol pour terrains difficiles
C’est l’utilisation star du Carpobrotus : le couvre-sol pour zones ingrates. Talus en plein soleil, pentes rocailleuses, sols pauvres et sablonneux, terrains en dévers difficiles d’accès… le Carpobrotus adore précisément ces terrains “impossibles”.
Sur un talus, il accomplit un double exploit : le rendre esthétique avec son tapis de fleurs éclatantes pendant six mois et fonctionnel grâce à sa capacité à stabiliser le sol contre l’érosion. Les tiges rampantes s’enracinant tous les 10-15 cm créent un filet végétal qui retient la terre, même sur pentes raides.
Densité de plantation : environ 9 pieds/m² pour une couverture rapide (6-7 pieds/m² si vous patientez). Paillez entre les plants avec des graviers en attendant la couverture complète. Celle-ci s’obtient en une à deux saisons selon les conditions.
Associations possibles : Les plantes en touffe haute (agaves, yuccas, cordylines) émergent sans problème du tapis. Intercalez aussi de gros Sedums arbustifs ou des Aeoniums qui garderont leur port dressé. Les bulbes printaniers (narcisses, tulipes botaniques, muscaris) fleuriront avant le démarrage du Carpobrotus, puis disparaîtront sous le feuillage estival.
Rocaille méditerranéenne et jardin sec
Dans une rocaille, le Carpobrotus trouve son cadre idéal : drainage parfait, chaleur des pierres, aspect minéral qui met en valeur son feuillage graphique et ses fleurs généreuses. Utilisez-le entre les rochers ou remplir des espaces délaissés.
Plantes qui peuvent s’associer :
- Delosperma cooperi : cousin plus petit et rustique (-15°C), fleurs rose magenta ;
- Sedum (variétés album, acre, rupestre) : textures différentes, floraisons étoilées ;
- Sempervivum (joubarbes) : rosettes graphiques en contraste ;
- Agave et Yucca : structure verticale émergeant du tapis ;
- Erigeron karvinskianus : marguerites tapissantes à floraison longue.
Pourquoi pas créer des zones thématiques ? Une zone “bord de mer” avec des Armeria maritima, Crithmum maritimum ou graminées argentées, ou encore une zone “désert fleuri” avec des Lampranthus, Yuccas ou cactus Opuntia ou Saguaro ?
Paillage minéral indispensable : graviers de rivière, pouzzolane, galets (épaisseur 5-7 cm). Ce paillis améliore le drainage, réverbère la chaleur, limite les herbes, et apporte une finition esthétique.
Culture en pot et suspensions
Le Carpobrotus peut s’adapter à la culture en pot, ce qui donne des possibilités décoratives notamment pour ceux sans jardin ou en région froide.
Choix du contenant : Pot large plutôt que profond (30-40 cm de diamètre pour un sujet adulte). Terre cuite idéale (poreuse), plastique ou résine acceptable. Impérativement percé au fond ! En savoir plus sur les pots des cactus et plantes grasses.
Pots suspendus : Ils mettent particulièrement en valeur le port retombant. Effet spectaculaire sur une terrasse ensoleillée !
Jardins de bord de mer
En bord de mer (zones autorisées), le Carpobrotus est parfait : il supporte les embruns salés, résiste aux vents violents (feuilles souples qui plient), tolère les sols sableux pauvres, et fleurit spectaculairement pendant six mois.
Compagnons littoraux :
- Armeria maritima : touffes compactes, fleurs roses pompons ;
- Eryngium maritimum : feuillage bleuté épineux, verticalité ;
- Crithmum maritimum : feuillage charnu aromatique, comestible ;
- Limonium (statice) : floraison légère en nuage ;
- Santolina : boules de feuillage argenté, floraison jaune ;
- Graminées résistantes au sel : Festuca glauca, Stipa tenuissima, Elymus arenarius.
Plantez en drifts (longues traînées irrégulières) plutôt qu’en massifs géométriques. Alternez zones très minérales et zones plantées pour créer du contraste. Paillez avec des galets de mer, graviers clairs ou coquillages concassés.

Carpobrotus et environnement : la dimension écologique
Comprendre le caractère invasif des Griffes de sorcière
Abordons maintenant la face sombre du Carpobrotus : son potentiel invasif dans certains milieux. Ce sujet concerne directement la biodiversité de nos zones littorales et implique la responsabilité de chaque jardinier.
Qu’est-ce qu’une espèce invasive ? Une espèce introduite hors de son aire naturelle qui se propage de manière incontrôlable au point de menacer les espèces locales et les écosystèmes. Le Carpobrotus coche ces cases dans certaines situations précises.
Pourquoi devient-il invasif ?
- Reproduction efficace : des milliers de graines par fruit, viables pendant des années, plus marcottage naturel à chaque nœud ;
- Dispersion facilitée : fruits consommés par animaux (oiseaux, rongeurs, renards) qui dispersent les graines via leurs déjections ;
- Croissance rapide : colonisation de plusieurs m² en une saison ;
- Compétitivité élevée : tapis si dense qu’il empêche physiquement les autres végétaux de s’installer, modifie le sol en augmentant sa salinité ;
- Peu d’ennemis naturels : loin d’Afrique, quasi aucun prédateur pour contrôler sa population.
Zones les plus touchées : milieux littoraux (dunes, arrière-dunes, falaises, pentes rocailleuses côtières). Sur le littoral méditerranéen et atlantique, le Carpobrotus forme parfois d’immenses tapis monospécifiques ayant éradiqué toute végétation locale.
Exemple frappant : Île de Bagaud (Parc National de Port-Cros) où la plante avait recouvert l’île entière.
Impact sur la biodiversité
Les plantes locales adaptées (souvent rares et protégées) disparaissent par exclusion compétitive. Certaines sont endémiques, rendant leur disparition encore plus dramatique. La faune est donc aussi impacté, c’est tout l’écosystème qui l’est !
A noter que ce problème concerne uniquement les zones littorales spécifiques. À l’intérieur des terres, en climat continental ou océanique, le Carpobrotus ne présente aucun caractère invasif et ne survit souvent même pas à l’hiver !
Réglementation et usage responsable
Restrictions principales :
- À moins de 20 km du littoral : plantation déconseillée voire interdite sur tous les départements métropolitains ;
- Milieux insulaires : plantation totalement proscrite (écosystèmes fragiles et vulnérables) ;
- Nouvelle-Calédonie : organisme nuisible dont l’introduction est interdite.
Au-delà de 20 km du littoral, en contexte urbain ou zones où le climat n’est pas favorable, la culture reste autorisée et ne pose aucun problème.
Vérifiez localement : Contactez votre mairie ou la DREAL (Direction Régionale Environnement Aménagement Logement) pour les restrictions spécifiques. Certaines communes ont des arrêtés interdisant explicitement la plantation.
Campagnes d’arrachage : Des gestionnaires d’espaces naturels (Conservatoire du littoral, Parcs naturels, associations) organisent régulièrement des chantiers pour arracher les tapis de Carpobrotus et restaurer la végétation locale. Les plantes arrachées doivent être éliminées par incinération ou enfouissement (jamais dans la nature ni sur le compost) !
Usage responsable – Zones sans risque :
- Au-delà de 20 km du littoral ;
- En climat continental ou océanique (hivers froids) ;
- En zone urbaine densément bâtie ;
- En culture en pot (quel que soit l’endroit).
Limiter les risques en zone favorable :
- Privilégiez la culture en pot (la plus sûre) ;
- Coupez les fleurs fanées avant formation des fruits ;
- Éliminez correctement les déchets de taille (poubelle, pas compost) ;
- Surveillez votre plante et arrachez les escapées ;
- N’offrez pas de plants à des personnes en zone littorale sensible.
Alternatives écologiques :
- Armeria maritima : native, floraison rose, résistante aux embruns ;
- Malcolmia littorea : petite plante des dunes, fleurs roses/blanches ;
- Sedum album : succulente tapissante, floraison blanche, rustique ;
- Delosperma cooperi : cousin rustique (-15°C), floraison rose magenta, non invasif ;
- Thymus tapissants : aromatique, mellifère, supporte la sécheresse.
Le jardinage responsable implique parfois de renoncer à certaines plantes, aussi belles soient-elles, quand leur culture risque de nuire à l’environnement. À vous de faire le bon choix selon votre situation !

Propriétés comestibles et médicinales : usages traditionnels
Les “figues de mer” : un fruit acidulé
Au-delà de ses qualités ornementales, le Carpobrotus produit des fruits comestibles appelés “figues de mer”. En Afrique du Sud, ils font partie de l’alimentation traditionnelle depuis des siècles.
Le fruit se forme après la floraison, grossit jusqu’à 2-3 cm de diamètre, et devient jaune à maturité. Texture charnue et juteuse, nombreuses graines dans un mucilage collant. Goût acidulé avec légère astringence, entre figue, kiwi et oseille. Les fruits de Carpobrotus deliciosus sont réputés les meilleurs.
Comment consommer ce fruit :
- Crus : ouvrir en deux et déguster à la petite cuillère (ou croquer directement) ;
- En confiture : cuire la pulpe avec sucre (1 kg pulpe pour 700-800 g sucre) et jus de citron. Ajouter épices (vanille, cannelle) si désiré ;
- En jus/smoothie : mixer avec eau, jus de fruit, miel, autres fruits ;
- Cuits : en compote ou pâtisseries.
Attention : les fruits de la succulente ont des propriétés laxatives s’ils sont consommés en grande quantité. Quelques-uns ne posent aucun problème, mais n’en mangez pas un saladier entier !
Vertus thérapeutiques traditionnelles
Le Carpobrotus edulis fait partie de la pharmacopée sud-africaine depuis des siècles. Ces usages traditionnels sont documentés mais non validés scientifiquement.
Le jus des feuilles agit comme astringent : contre les troubles digestifs (diarrhée, dysenterie, crampes d’estomac) ou maux de gorge, laryngite, infections buccales légères. Frotter les feuilles fendues pourrait soulager les brûlures, coups de soleil, coupures, écorchures et piqûres d’insectes (soulage démangeaisons)
Propriétés antifongiques : Des recherches ont identifié des composés actifs contre certains champignons pathogènes.
Questions fréquentes
Oui, mais modérément. Il tolère de brèves gelées légères (-1°C à -4°C selon les espèces), en zone à condition que le sol soit parfaitement drainé et le froid sec.
Techniquement oui, mais légalement et écologiquement non. À moins de 20 km du littoral, il est déconseillé voire interdit (risque invasif) de le planter. Dans les terres : aucun problème, mais il faudra probablement le cultiver en pot (ne survivra pas à l’hiver en extérieur). Vérifiez toujours les réglementations locales.
Plant adulte acheté : floraison dès la première année. Si bouture réussie : année suivante. Plant issu de semis : 2-3 ans. Une fois lancée, la floraison dure de mai à octobre !
Difficile, comme pour les autres succulentes et cactus. Besoin impératif de plein soleil direct (6h minimum) qu’on obtient rarement en intérieur. Supportera quelques semaines en intérieur lumineux (hiver), mais la culture en intérieur peu lumineux aboutira à l’étiolement et l’absence de floraison (l’exposition est essentielle pour la floraison des cactus et plantes grasses). Privilégiez leur culture en balcon et terrasse, en rentrant votre plante pendant les période de gel.
Taillez les tiges qui dépassent (il supporte très bien). Installez des bordures enterrées pour le contenir. Surveillez et arrachez immédiatement les tiges qui dépassent. Si ce n’est pas gérable, arrachez complètement les racines superficielles (facile après une pluie par exemple).
Absolument ! Les fleurs produisent un nectar abondant très visité par abeilles, bourdons et divers insectes. Excellent pour favoriser les pollinisateurs pendant toute la belle saison.
Non, c’est contre-productif. Il pousse dans des sols très pauvres. L’engrais favorise la croissance du feuillage au détriment de la floraison et rend les tissus mous. Le secret d’une belle floraison ? Un sol pauvre, un drainage parfait, du plein soleil et de la sécheresse. Moins vous en faites, mieux c’est !
Oui, parfait ! S’associe bien avec Sedum tapissants, Delosperma, Sempervivum (bordure), et succulentes arbustives (Aeonium, Kalanchoe). Pour le contraste, choisissez des graminées compactes (Festuca, Carex) ou plantes graphiques (Agave, Yucca).
Manque de soleil (la plus fréquente) – déplacez vers plus ensoleillé ;
Plant trop jeune – patience ;
Excès d’eau/engrais – arrêtez complètement, laissez stresser dans substrat sec ;
Substrat trop riche – rempotez dans mélange plus pauvre et drainant. Solution : moins d’intervention !
Conclusion
Nous voilà au terme de ce guide sur le Carpobrotus, cette succulente aussi fascinante que controversée.
Les atouts : Beauté spectaculaire avec ses grosses fleurs rayonnantes six mois par an, culture d’une facilité déconcertante (pas d’arrosage en pleine terre, aucun engrais, peu d’entretien), plante idéale pour les terrains difficiles (talus, rocailles, sols sableux) et situations extrêmes (chaleur, sécheresse, embruns), couvre-sol redoutablement efficace qui stabilise les sols.
La face sombre : Dans certains contextes (sur le littoral méditerranéen et atlantique), la Griffe de sorcière devient une menace écologique majeure en étouffant la végétation locale. Cette réalité impose une utilisation responsable et un respect strict de la réglementation : pas de plantation à moins de 20 km des côtes et interdiction dans les milieux insulaires.
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